Je suis une amoureuse inconditionnelle de la vieille ville de Genova, cette ville du nord-ouest de l’Italie qui dévale littéralement dans la mer depuis les pentes abruptes des Monti Liguri. Mais qu’est-ce qu’elle m’en fait voir !

Genova, c’est pas le genre « sois belle et tais-toi » …

Non, Genova Centro n’est pas une pin-up, elle ne se maquille pas (ou alors bizarrement), elle refait ses façades mais sans logique ni stratégie, elle n’est pas une « fashion victim » et préfère au bling bling l’authenticité de ses classes populaires et de ses jeunes.

Alors forcément, pour en tomber amoureux, déjà esthétiquement, il faut tout d’abord oser l’aborder et ne pas se laisser tromper par son côté fermé, rêche et sombre. Non, non, il faut la regarder avec des yeux tendres et se souvenir que c’est une très très vieille dame !

Au premier abord, nombreux sont ceux qui se laissent berner. Oh, bien sûr, Genova offre des joyaux historiques et architecturaux, mais le problème c’est qu’il faut aller les chercher car ils sont souvent cachés dans le méandre des ruelles. Du coup, on se perd, le nord se retrouve au sud, on passe d’un caruggi honorablement fréquenté et au virage suivant c’est le monde des prostituées qui l’anime. Nous sommes face à un palais du 14ème siècle restauré dans toute sa splendeur avec ses plafonds peints en ogive et à son flanc a poussé une verrue des années 70 à la façade grise et terne.

Pour comprendre Genova, il faut donc tout d’abord accepter de se perdre, à la fois physiquement et émotionnellement. Le beau côtoie le laid, et la seule perspective qui permette de voir loin est de lever les yeux et de s’éblouir des percées du soleil entre les immeubles, parfois si proches qu’ils semblent se toucher.

Il faut aussi aimer être dans le peuple, celui des travailleurs, des précaires, des immigrés et des jeunes ! Oh bien sûr, il y bien une certaine gentrification, mais qui accepte de vivre dans un immeuble bien souvent sans ascenseur, sans lumière pour les appartements les plus bas, avec un vis à vis où l’on peut presque se toucher d’une fenêtre à l’autre ? Assurément, pas ceux qui sont attachés aux normes contemporaines de confort de vie.

Et puis il faut être en forme physiquement ! Les ruelles ne sont pas accessibles aux véhicules à moteur (hormis les bennes à ordures et les ambulances qui sont d’ailleurs taillées à l’échelle des lieux, c’est à dire très très réduites !), parfois elles sont en pente très raide au point qu’elles se résument à des centaines de marches d’escaliers !

Un vrai défi pour les photographes

Ca fait maintenant presque de 17 ans que j’ai fait connaissance avec cette ville. Elle a connu mes débuts en photographie et d’emblée elle m’a mise au défi. Comment faire pour la photographier sans la caricaturer, en lui rendant son âme déglinguée tout en exprimant ce qu’elle m’évoque ?

Aujourd’hui encore, alors qu’elle m’a permis de faire mes armes, elle continue de me défier !

Comment sortir des ces compositions étroites imposées par les ruelles ? Je n’ai pas encore trouvé la solution, ou disons pas tout à fait … C’est drôle d’ailleurs car je me suis rendue compte qu’en Chine mes cadrages sont principalement horizontaux alors qu’ici ils sont verticaux. Je me disais même que ma période « cadrage vertical » devait être terminée ! Mais en fait non 😉 Je suis tout simplement influencée par l’esprit du lieu. Etendue et horizontalité d’un côté, étroitesse et verticalité de l’autre …

Alors bien sûr, je ne suis pas en train de dire que nous sommes condamnés au cadrage vertical à Genova, mais il est vrai que en ce qui concerne les ruelles c’est vraiment difficile d’en sortir (la preuve, toutes les premières photos de cet article sont verticales !)

En fait, ce que j’ai compris, c’est que en ce qui concerne le cadrage, il ne s’agit pas seulement de la répartition des éléments concrets et notamment de l’emplacement du point fort, mais aussi de la question de la répartition de la lumière ! Comment n’y avais-je jamais pensé avant ?

Ces 2 photos sont un exemple parfait de l’autre immense défi photographique que nous lance Genova : la gestion de la lumière.

Du fait de la hauteur des immeubles qui comptent souvent 6 à 8 étages avec en plus des hauteurs de plafond vertigineuses et de l’étroitesse des rues, Genova est une ville sombre. En soit ce n’est pas un problème insoluble surtout avec les appareils d’aujourd’hui qui permettent de bien augmenter les iso sans se soucier de la qualité. Mais c’est quand il fait beau (et c’est quand même souvent le cas) que ça pose un sérieux problème ! Car il s’agit d’un soleil du sud et d’un ciel du sud donc … ultra lumineux !

Donc, à moins de se lancer dans le bracketing d’images et de passer de longues heures ensuite à les assembler en post production pour obtenir un effet HDR d’un goût souvent douteux, il faut se lancer dans un choix drastique : exposer pour les hautes lumières ou pour les basses lumières.

Mais le choix se révèle souvent cornélien à Genova, c’est pourquoi cette ville est si difficile à photographier ! Combien de fois suis-je rentrée frustrée en ayant le sentiment que je suis restée à la surface de ce qu’elle m’offre.

HDR : High Dynamic Range ou en français Plage Dynamique Elevée. Ca signifie que l’on va essayer autant, que possible, de reproduire l’étendue de la vision naturelle lorsque nous sommes en situation de fort contraste. Le but est d’éviter d’avoir des noirs qui sont gris ou des blancs cramés. Personnellement, à de rares exceptions près, je n’aime pas du tout le résultat de cette technique car, paradoxalement, elle conduit à une photo qui manque précisément de naturel !

La partie de ping-pong

Ainsi, lors de ma dernière sortie, j’ai accepté de jouer une partie de ping-pong lumineuse avec elle 😉 Et je dois dire que je me suis bien amusée ! Mon idée a consisté à aller chercher chaque élément de lumière, le moindre rayon de soleil, qu’il soit direct ou indirect, jusqu’aux réflexions de lumière sur les façades ou dans les vitres. Bref, observer les rebonds de lumière et tenter de les contrôler dans mon cadre. Ca a été une belle partie et assurément je retenterai l’expérience !

Alors ? Est-ce que ça vous donne envie de tenter de percer la carapace de Genova ? Je pensais profiter de ma longue présence en Europe pour organiser un workshop photo sur le défi Genovese. Ca vous tenterait ? Ca pourrait se faire sur 2 jours, pendant un week-end courant mars, par exemple celui du 19 et 20 mars 🙂

Si ce projet vous intéresse, vous pouvez me contacter par mail, me laisser un commentaire ci-dessous ou bien vous rendre directement à la page de réservation ici : http://www.photofolle.net/formations/genova/?occurrence=2022-03-19

J’adorerais partager avec vous l’expérience Genovese !!!

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12 pensées sur “Genova, championne de ping-pong lumineux !

  1. Merci pour ce voyage aux lumières pénétrantes . Le résultat artistique est réussi . Vous avez raison ; la difficulté devient créative . Nous allons attendre d’y voir plus clair prochainement ! A bientôt avec de nouvelles photos!

    1. Bonjour Mangeon ! C’est à dire que s’il y a une formule toute faite, comme en mathématiques, pour résoudre la difficulté, tout va bien finalement 😉 Mais si on souhaite explorer d’autres possibilités que celles déjà offertes, c’est là que la créativité entre en jeu 🙂 Je vous dis alors à tout bientôt !

  2. Article très inspirant. D’autant plus que je serai à Gênes la semaine prochaine pour quelques jours. Hâte d’éprouver vos conseils (cadrage/lumière) Merci pour cette inspiration !

    1. Bonjour Thierry A ! Aaah, ça me fait franchement plaisir si j’ai pu vous indiquer quelques pistes ! Je vous souhaite de vous régaler et qui sait … peut-être nous croiserons-nous dans les viccoli ? 🙂

      1. re-bonjour Laurence,
        Merci pour votre réponse.
        Je pars demain pour Gênes et je revois vos photos avec grand plaisir. Quelle inspiration !
        Je me demandais quelle focale vous utilisiez dans cette série ? Je compte partir avec un 28mm et un 50mm. Je n’aime pas trop les zooms. Merci encore !

        1. Re-re-re bonjour Thierry A 🙂 🙂 Toutes ces photos ont été prises au 28 mm. Je crois que c’est bien adapté aux ruelles car comme elles sont très étroites, ça permet de leur donner de la profondeur. Et … Je vous rejoins à 1000 milliards de pourcents sur la question des zooms 😉 😉 😉

          1. Désolé, Laurence, pour cette « réponse » tardive ! J’ai adoré Gênes et surtout j’y ai repris du plaisir à faire de la photo de rue – un peu grâce à vous je pense ! – car votre série m’a beaucoup inspiré. Ah! le passage du théâtre avec ses grosses lampes-boules !! Et le mélange de grandiose architectural et de lieux décatis voire « pourris » m’a bien plu ! Bref, merci encore. Je pense que je vais m’inscrire à vos ateliers cette année ! A bientôt. Thierry.

            1. Bonjour thierry !

              Et bien je suis absolument ravie ! Et les photos alors, elles ont donné quoi ? Ce mélange de grandiose et de décatis, ça a bien marché ?
              Je serais bien entendu enchantée de travailler avec vous ! Il n’y a plus qu’à comme on dit 😉 😉

  3. Bonjour, Super ce reportage de votre ville de prédilection. Les vues en noir et blanc renforce en plus une intensité. C’est de la magie photographique certainement accentuée en post-traitement.
    Cordialement

    1. Bonjour Marc ! Un grand merci pour votre avis ! Oui, ici le noir et blanc donne un côté théâtral à la ville. Pourtant, croyez-moi, c’est une ville très colorée 🙂 Quant au post traitement, en effet c’est une étape que je pense essentielle et où je prends un immense plaisir. C’est lui et uniquement lui qui nous permet d’aller jusqu’au bout de notre vision. S’en priver, c’est comme si on laissait une pellicule à développer dans une grande surface sans âme. En user, c’est comme avoir sa propre chambre noire et contrôler tout le processus 🙂

  4. Superbe ville que Genova. Merci pour ce partage et pour la beauté de ton regard sur celle-ci.

    1. Merciiiii chère Cécile !!! Je suis sûre que tu adorerais cette ville !

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